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UNE PAGE DE CHILD-HAROLD.

Nous enveloppe ; avant qu’on ne me la ravisse.
Accoutume aux aveux ta bouche encor novice.
Et tes yeux sur mes yeux, et ta main dans ma main,
Comptons. par nos baisers les arbres du chemin…
Et, quand ils reviendront, crions à leur oreille
Qu’on ne verra jamais une fête pareille !


UNE PAGE DE CHILD-HAROLD


(Poésie anglaise. — LORD BYRON)


O mort ! tu m’as tout pris, faucheuse universelle !
Une mère, un ami, trésor si rare ! — et celle
Qu’un sentiment plus doux attachait à mon sort !
A qui furent tes coups plus terribles, ô mort !
Toujours de nouveaux deuils, compagnons de mes courses,
Ont, pour moi, du bonheur empoisonné les sources.

Quel est le plus cruel malheur qui, sur le front,
Des rides plus avant nous imprime l’affront.
Malheur de la vieillesse, et plus grand qu’elle-même ?
N’est-ce pas d’avoir vu rayer tout ce qu’on aime
Du livre des vivants, où l’on demeure seul ?
N’est-ce pas d’être un mort qui cherche son linceul ?
Je fléchis le genou devant le bras céleste
Qui de mon pauvre cœur a déchiré le reste.
Coulez rapidement, jours vains et superflus,
Marchez vite à l’abîme ! hélas ! vous n’avez plus
A m’apporter jamais de douleurs ou d’alarmes,
Le temps ayant détruit ce qui faisait les charmes
De ma vie, et versé sur mes trop jeunes ans
De l’âge des vieillards tous les chagrins pesants.