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SOUS-OFFS

niversaire ; nous devions le fêter… Il faut que je la fasse prévenir… Favières, un homme en tenue, tout de suite… Oh ! elle va venir…

— On découche, dit Petitmangin.

— Mais il y aura contre-appel… et plutôt deux fois qu’une.

— Moi, reprit l’autre, j’ai une permission de vingt-quatre heures. Nous resterons couchés demain toute la journée, avec un bon feu, des friandises, du thé…

Il s’arrêta pour protester contre un geste de son collègue : — Oh ! non, pas ça… très peu. Nous ne nous fatiguons pas. Moi, au contraire, je me refais.

À cinq heures, un homme de garde se présenta dans le bureau de Montsarrat.

— Chef, il y a une femme qui vous demande à la porte.

Le sergent-major se tourna vers Favières, de l’air dont il eût dit : « Hein ? m’étais-je trompé ? »

Puis il descendit, fit une absence de dix minutes environ, revint, radieux, enflé de satisfaction, et jetant devant Favières une pièce de cinq francs, en même temps qu’il déposait sur la table un litre de cognac :

— Ah ! s’écria-t-il, elle est tout de même gentille ! Comme nous ne pouvons passer la soirée ensemble, elle m’apporte de quoi réveillonner avec mes collègues… Le cognac, vous savez, quand il n’y en aura plus, il y en aura encore.

Il empocha l’argent, comme s’il avait voulu simplement en souffleter Schnetzer, la caserne, l’uniforme, le métier…

Puis il alla dîner. Quand il remonta :

— Vous ne sortez pas, fourrier ? dit-il.

— Ma foi ! non, répliqua Favières, fumant devant le poêle.

Montsarrat parut heureux de ne pas rester seul. Il déboucha le litre de cognac, emplit deux petits verres et, les paumes tendues vers la chaleur, se montra d’emblée engageant.

— C’est votre femme qui est venue ce soir ? dit le fourrier, entrant en matière.

— Oui… et désolée ! Pensez donc ; c’est l’anniversaire