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SOUS-OFFS

matricules à la page 7 et commanda : « À droite… alignement !… Fixe !… »

Le chef de bataillon entrait au quartier. Il inspecta brièvement les hommes de garde et marcha droit sur les nouveaux venus, le képi sur l’oreille, avec une crânerie d’officier sortant des zouaves, dont il conservait d’ailleurs, les pantalons-sacs. Jeune, — trente-huit ans, — il dominait le soldat par la confiance absolue que celui-ci traduisait ainsi : il la connaît. C’était le supérieur dont la supériorité ne dépend pas uniquement du grade qui la confère.

Il ne s’arrêta pas devant l’adjudant Laprévotte.

— Allez m’attendre à la salle des rapports ; je vous verrai tout à l’heure, dit-il. Et il stationna premièrement devant Tétrelle, dont il collationna les livrets.

« Recrutement de la Haute-Saône… résidant à Vesoul… »

Il regarda l’homme, un garçon solide, trapu, avec des yeux naïfs, une bouche sensuelle, un menton dur, un front plat et carré qui décelait une moyenne intelligence.

Le commandant ne s’y trompa pas, demanda seulement :

— Qu’est-ce que vous faisiez chez vous ?

— J’étais commis de nouveautés, à Vesoul…

— Jusqu’à quel âge vous a-t-on laissé en pension ?

— Quatorze ans.

— Études primaires… Bien. Vous avez une bonne écriture ? Oui. Vous travaillerez chez votre sergent-major ; nous verrons…

Et il passa à Favières, un petit bout d’homme, l’air vif, l’œil aigu, à peine de moustache, une bouche crispée, moqueuse, des allures inquiétantes d’investigateur ironique.

Le commandant parcourut l’état civil : « Favières (André). Né… » Ah ! vous êtes Parisien… Employé… Où cela ?

— Au Comptoir d’escompte, mon commandant.

— Taille… 1 mètre 57.

Il toisa le jeune homme :

— Il faut faire de la gymnastique, mon garçon…, vous développer. Quelles études ?