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MARCELINE DESBORDES-VALMORE

natale voisine du cimetière, de l’église Notre-Dame et des remparts de Douai… Puis un vent de tempête rabattait sur eux de grandes flammes qui s’élevaient comme d’un tas de débris auxquels on met le feu et qui répandent en rideau une fumée épaisse. Des villes s’évanouissaient aussitôt qu’entrevues à cette clarté d’incendie : Pointe-à-Pitre, Dunkerque, Bordeaux, Lyon, Rouen, Lille, Bruxelles…, vingt autres ! Des théâtres s’abîmaient dans la fournaise, des coulisses, des plateaux, des loges, à travers lesquels couraient des gens éperdus qu’elle reconnaissait au passage, mais dont elle avait oublié les noms, tous les comparses du drame de sa vie.

Et, le vent tombé, la fumée dissipée, de tant de choses mortes, il ne montait plus qu’une langue de feu, inextinguible celle-là, qui veillait auprès de son cœur, comme auprès d’un malade, la nuit, le Souvenir d’amour !

Ensuite, tout se confondait un peu. C’était un escalier interminable et dur, en échelle, coupé de paliers où elle s’arrêtait un moment pour écouter son mari, ses enfants, Pauline, Caroline, des voix…

Ce qui lui faisait dire :


Je monte et je finis comme je peux mon existence…

Ou bien :

On dirait que je vis en attendant de vivre !