alors vraiment que la malheureuse peut dire qu’elle ne sait où jeter son âme ! Une mère qui voit mourir son enfant, est morte avant lui. C’est ce tronc creux, envahi par les fourmis, qui demeure debout et tord, en signe de deuil, ses bras nus et ruisselants. Ils ruisselèrent encore plus d’une fois, dans l’hiver de sa vie où Marceline entrait.
En 1854, elle perdit sa sœur aînée, Cécile, celle qui lui avait appris à lire. Elle n’avait plus qu’une confidente, Pauline Duchambge, sa chère pareille en tout, sa plus fidèle, l’alibi de son cœur ; et elle lui écrivait :
Écoute. Je suis allée à l’église où j’ai fait allumer huit cierges humbles comme moi. C’était huit âmes de mon âme : père, mère, frère, sœurs, enfants ! Je les ai regardé brûler, et j’ai cru mourir. Ne dis cela qu’à toi. C’était une visite à Dieu.
Son cœur se replie sur cette amitiée profonde. N’est-ce pas à Pauline qu’elle a dit, un jour, cette parole admirable :
Nous pleurerons toujours ; nous pardonnerons et nous tremblerons toujours : nous sommes nées peupliers !
Pauline s’étant plainte, une autre fois, que son nom lui paraissait froid quand Marceline ne l’accompagnait pas d’une épithète caressante, la vieille amie s’écriait :
Ah ! Pauline, tu ne sais pas ce que c’est que ton nom pour moi ! C’est toute l’amitié de ton cœur qui y passe : c’est le vin de ma pauvre âme ! Je croyais que tu le savais !