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LA MÈRE

pleurs et des plaintes de Pauline se sont traduits dans ces vers que tu aimes et dont elle est, en effet, le premier auteur… Toute ton indulgence sur le talent que je dédaignerais complètement sans le prix que ton goût y attache, ne me console pas d’une arrière-pensée pénible qu’il aura fait naître en moi… Tu vois bien que j’ai raison, mon bon ange, en n’éprouvant pas l’ombre de contentement d’avoir employé [mon temps] à barbouiller du papier, au lieu de coudre nos chemises, que j’ai pourtant tâché de tenir bien en ordre, tu le sais, toi, cher camarade d’une vie qui n’a été à charge à personne.


Déjà, elle lui avait fait, au milieu d’une crise analogue, cette autre piqûre de morphine :


Ces poésies qui pèsent sur ton cœur, soulèvent maintenant le mien du regret de les avoir écrites. Je te répète avec candeur qu’elles sont nées de notre organisation : c’est une musique comme en faisait Dalairac, ce sont des impressions observées souvent chez d’autres femmes qui souffraient devant moi. Je disais : « Moi, j’éprouverais telle chose dans cette position » ; et je faisais une musique solitaire. Dieu le sait.


Naïve diversion ! Innocent subterfuge ! Ils ne nous donnent pas le change en dépit des précautions de Marceline pour le faire prendre à Valmore. Car elle ne se contentait pas d’invoquer de vive voix ou dans sa correspondance cet alibi : Pauline ; dans l’album que la Bibliothèque de Douai conserve[1], elle a glissé, parmi des pensées,

  1. Voir p. 125.