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MARCELINE DESBORDES-VALMORE

Variante de son vers :

Je ne sais qu’inventer pour te faire un bonheur.


Je te suivrais avec joie au fond d’une prison ou d’une nation étrangère, lu le sais, et ces pensers, pour mon malheur, ne t’assaillent jamais qu’après la lecture de mauvais barbouillages dont j’ai honte en les comparant aux belles choses que tu m’as donné le goût de lire. Après quoi je te dirai simplement, vraiment et devant Dieu, qu’il n’existe pas un homme sur terre auquel je voulusse appartenir par le lien qui nous unit. Tous leurs caractères ne m’inspireraient que de l’effroi. Ne te l’ai-je pas assez dit pour t’en convaincre ! Mais, hélas ! c’est donc vrai : « On ne voit pas les cœurs ! »


Le mois suivant, autre écho d’une jalousie lancinante :


Oui, le sort nous a fait bien du mal en nous séparant, mais je me sens aussi pénétrée de l’espoir que ce n’est qu’une grande et sévère épreuve, après quoi je serai réunie à toi, Valmore, pour qui je donnerais vingt fois ma vie. Si ce serment, vrai devant Dieu, ne suffit pas à la tendre exigence de ton affection pour moi, je suis alors bien malheureuse, et si tu vas chercher dans le peu de talent dont j’abhorre l’usage à présent, des recherches pour égarer ta raison, où sera le refuge où j’abriterai mon cœur ? Il est à toi tout entier. La poésie n’est donc qu’un monstre si elle altère ma seule félicité, notre union. Je t’ai dit cent fois, je te répète ici, que j’ai fait beaucoup d’élégies et de romances sur des sujets donnés, dont quelques-unes n’étaient pas destinées à voir le jour. Notre misère en a ordonné autrement. Bien des