Page:Descaves - La Vie douloureuse de Marceline Desbordes Valmore.djvu/249

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
227
LA MÈRE

Elle le consulte. Ce n’est point un juge complaisant ni d’une remarquable pénétration, non ! Mais jamais il ne dénigre de parti pris et la rareté de ses louanges donne plus de prix à celles qu’il décerne. Quand il la félicite de son roman : Violette, elle tremble encore qu’il ne soit aveuglé par sa tendresse pour elle et ne se rassure qu’auprès de l’éditeur, également satisfait.

Le pli professionnel, voyons, est-ce — pour un acteur qui s’obstine à jouer en province lorsque ce genre y est démodé, — est-ce le désir invincible d’entrer à la Comédie-Française ? Mais c’est justement parce que celle-ci lui apparaît comme le sanctuaire des dieux morts et le tombeau de leurs restes, que Valmore, desservant in partibus, voulait officier dans l’un des derniers temples ouverts aux fidèles. Il aimait sincèrement les chefs-d’œuvre classiques ; il en gardait les traditions et n’était pas, sans doute, plus indigne de les interpréter que tant de sociétaires par qui nous les avons entendu rugir ou bêler.

On ne pouvait lui reprocher que de venir trop tard dans un siècle qui n’était plus le dix-huitième.

Au lieu de le plaindre, on s’est égayé à ses dépens, en le comparant à Delobelle, qui ne renonce pas. Mais Valmore, passé la quarantaine, ne demande pas mieux que de renoncer, lui. C’est très bien de dire à l’acteur qui commence à vieillir et ne trouve plus d’engagements : « Faites autre chose. » Faites quoi ? Il avait appris à