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MARCELINES DESBORDES-VALMORE

d’être née ». Elle a pris la becquée pour en vivre toujours.

« J’ai un souvenir très clair de mes premières années, » écrivait-elle, en 1823, à son compatriote Duthillœul, bibliothécaire de la ville de Douai.


Notre maison tenait au cimetière Notre-Dame. Il y avait un calvaire, des tombeaux, la vue d’un rempart, une tour avec beaucoup de prisonniers. Je courais partout ; partout je trouvais des clochettes, des fleurs de carême et des petites compagnes dont les figures sont encore toutes peintes dans mon souvenir. Je l’ai dit faiblement dans le Berceau d’Hélène.


Elle le répète, en 1836, dans une lettre qu’elle adresse à un autre de ses amis, Antoine de Latour, le traducteur de Silvio Pellico :


Cette frêle existence, monsieur, s’est glissée comme à regret sur la terre, au bruit d’une révolution qui devait la faire tourbillonner avec elle. Née à la porte d’un cimetière, au pied d’une église dont on allait briser les saints, mes premiers amis solitaires ont été ces statues couchées dans l’herbe des tombes. Pour ne pas appuyer trop longtemps sur des souvenirs pleins de charmes pour moi, mais trop longs pour vous, je joins ici la Maison de ma mère, où mon cœur a essayé de répandre cette passion malheureuse et charmante du pays natal, quitté à dix ans pour ne jamais le revoir.


Rebelle, en général, aux investigateurs (« Qu’ai-je besoin de biographie, moi qui vis dans une armoire ? » disait-elle), Marceline, heureusement,