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LA MÈRE

pas lui dire : « Je suis plus pauvre que vous. » Il ne le croirait pas[1].

Mais voici une confidence à son mari, plus navrante encore. Elle est du 24 décembre 1840.

Tu ignores que mon cher anneau a été vendu à Rouen, avec ce que nous y avions laissé en gage. Ma sœur n’a plus eu enfin de quoi renouveler les frais. Jamais elle ne m’a répondu à ce sujet, mais je le devine trop, et je te demande un anneau comme présent nécessaire à mon bonheur.


Cette alliance, en quels jours de détresse l’avait-elle engagée ? Sans doute sept ans auparavant, quand Valmore, sifflé à Rouen, avait dû quitter la ville du jour au lendemain !

Je ne sais pas s’il y a, dans la volumineuse correspondance de Mme Valmore, un trait de pauvreté plus amer.

Le 1er janvier 1841, la famille se trouvait réunie. Valmore était de retour à Paris. Il s’y dévora. Seul, il ne faisait rien, Ondine passait des examens ; Hippolyte dessinait, tantôt chez Delacroix, tantôt au Louvre ; leur mère s’épuisait en petits travaux littéraires pour compenser une perte sensible : sa pension venait d’être réduite… parce que Thiers avait eu l’idée de gratifier Paris d’une enceinte fortifiée aussi inutile que dispendieuse !

  1. Au mois de décembre 1842, en envoyant à son amie ses vœux pour l’année suivante, Caroline Branchu ajoute : « Ce n’est pas parce que votre situation semble s’améliorer, que tu me priveras de t’offrir de temps en temps une paire de gants. » (Lettre inédite communiquée par Mme A. Daudet.)