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MARCELINE DESBORDES-VALMORE

D’autant plus que rien ne paraît avoir amadoué le locataire morose de la Childebert. La garde-malade qui lui ferma les yeux ayant refusé une bague et un bracelet que Marceline lui offrait, comme souvenir : « Ce dédain me navre, écrivait celle-ci à quelqu’un. Cet homme bon et injuste à la fois donnait de moi des idées si étranges… » Et, autre part : « J’ai toujours aimé profondément mon oncle, qui me rendait si rarement justice. »

Il mourut, triste et besogneux, le 30 avril 1828 ; et c’est alors que, de Lyon, où elle se trouvait alors, Marceline, apprenant le décès, écrivit sur l’heure, au défunt, cette lettre singulière, où le don qu’elle avait reçu d’extérioriser ses sentiments, se découvre à plein :

Mon oncle ! — Adieu, mon oncle ! — Il y a une heure que je le sais. — Tout espoir est fini. — Adieu !…

Et j’ouvrais cette lettre sans défiance, car celle d’avant-hier m’avait tranquillisée. Vous étiez mieux, mon oncle. Je ne craignais rien en rompant ce cachet. Je cherchais une nouvelle certitude de votre convalescence. Hélas ! mon Dieu, à la seconde ligne, j’ai reçu un coup dans le cœur, je l’ai reconnu ! J’ai cru sentir des fils se casser dans ma tête, et un nuage a passé sur moi. — Adieu, mon oncle ! — Mais regardez-moi maintenant des yeux de votre âme qui m’a tant aimée !

Vous êtes bien sûr que je vous l’ai rendu. — Quel lien se brise pour moi ! Comme je sens qu’il a commencé avec ma vie, mon oncle ! J’étouffe de la douleur de ne vous avoir pas revu. Mais regardez-moi bien jus-