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L’ÉPOUSE

Elle était sincère, plus tard, lorsqu’elle déclarait à Sainte-Beuve : « J’ai essayé d’écrire sans avoir rien lu ni rien appris, ce qui me causait une fatigue pénible pour trouver des mots à mes pensées. »

Son modique vocabulaire est tout entier dans ce Cahier de musique sur lequel son regard embué ou rêveur s’est posé bien souvent. Mais il n’a pas de prix pour moi à ce titre seulement. Il est autre chose qu’une relique sentimentale, autre chose qu’un témoin de sa peine ou qu’un herbier de théâtre ; il est réellement l’humble serviteur de son génie, il lui a fourni quelques-uns des patrons médiocres sur lesquels elle travailla, avant d’acquérir une forme poétique indépendante.

Nous savons, en effet, qu’elle commença par chanter ses vers.

Je les essaie sur des airs que j’adore et qui me forcent à mon insu à plus de rectitude sans distraction.

Renseignement qui a permis de rapporter telle de ses élégies à un air de Monpou, telle autre à une mélodie de Schubert, d’autres encore à des lieds allemands, voire à des rondeaux d’anciens vaudevilles serinés à son adolescence errante et nécessiteuse.

Si bien que les écailles d’opéras dont la collection est sous mes yeux, rythmèrent sans doute ses premières inspirations. Et dans quels moments ! Dans quels moments les ariettes de Dalayrac et