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L’ÉPOUSE

Il est regrettable, enfin, que nous fasse défaut le portrait annoncé par Marceline à son frère dans sa lettre du mois de janvier 1817. Il nous montrerait la femme un peu fanée, dont son camarade de théâtre, Prosper Valmore, allait bientôt s’éprendre.

On pourrait ne rien savoir des préliminaires d’un mariage d’inclination entre deux êtres qui se voyaient tous les jours et plutôt deux fois qu’une : à la répétition, l’après-midi, et à la représentation, le soir. Il est vrai qu’ils n’échangeaient alors que des propos forcés, mais ces propos étaient brûlants et suivis d’étreintes… Cependant, ces facilités n’empêchaient pas Marceline et Valmore de s’écrire. Les réponses de la bergère au berger ont seules été publiées. Elles indiquent, de sa part à lui, un penchant invincible et, de son côté à elle, une incrédulité qui cessa seulement quand il dénoua l’intrigue en demandant sa main, comme à la fin de presque toutes les pièces qu’ils jouaient ensemble.

« Oppressée de joie et de surprise, écrit-elle, je crains… pardonnez-moi, je crains d’abandonner mon âme au sentiment qui la remplit, qui l’accable, oui, cette ivresse de l’âme est presque une souffrance ! Ô prenez garde à ma vie ! »

Elle souffrait d’être aimée parce qu’elle faisait son examen de conscience, et qu’un scrupule de son cœur combattait sa raison et son nouveau penchant. Elle le faisait même touthautson examen de conscience, dans l’élégie intitulée : l’Inconstance.