Page:Descaves - La Vie douloureuse de Marceline Desbordes Valmore.djvu/115

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
93
LA JEUNE FILLE

coiffure en cheveux, lout le long de la pièce ! Le travesti même seyait encore à sa gracilité de visage et de corps. À vingt-huit ans, ses qualités de naturel et de sensibilité étaient les mêmes que douze ans auparavant. Bref, ingénue, jeune mère ou garçonnet, elle était toujours la brebis bêlante ou l’agneau sans tache de la bergerie dramatique, où d’habiles pasteurs introduisent le loup, afin d’avoir l’occasion de châtier une témérité qui est, cependant, bien plus la leur que la sienne.

À l’Odéon, Marceline avait retrouvé la belle Délie, engagée l’année précédente, et renoué avec elle.

La comédienne adulée avait une bonne part de responsabilité dans les malheurs de son amie. Avec le cœur « excellent et facile » que lui a reconnu plus tard le mari de Mme Valmore, qui sait si Délie ne se proposa pas de réparer le mal qu’elle avait fait inconsciemment ? Et réparer le mal, vis-à-vis d’une victime comme Marceline, ce n’était pas lui procurer un nouvel amant, c’était lui rendre l’ancien qu’elle attendait toujours.

Il ne reviendra plus… Il sait que je l’abhorre ;
Je l’ai dit à l’Amour qui déjà s’est enfui.
S’il osait revenir, je le dirais encore !
Mais on approche, on parle… Hélas ! ce n’est pas lui !

Justement, le voyageur était revenu. Et dans quel état ! Malade, sérieusement malade même, enfin, bien à plaindre. On devine l’effet de cette