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LA JEUNE FILLE

lettre à son frère Félix, elle parle de son fils vivant et c’est même pour elle, alors, l’occasion de nous donner un détail qui a son prix.

Dans l’élégie : Adieu ! du recueil de 1833, les Pleurs, Marceline s’écrie :

Partir ! tu veux partir ! oui tu veux voir ton père…
Va dans tous les baisers d’un enfant qu’il adore
Lui porter les baisers de l’enfant qu’il ignore ;
Mets sur son cœur mon cœur, mon respect, mon amour ;
Il est aussi mon père, il l’a donné le jour !
… Quittons-nous !
Porte de frais parfums à sa saison austère
Toi, la plus belle fleur qu’il sema sur la terre !
Mais, pour le demander, ne sois plus à genoux ;
Car mon cœur est trop près de ton cœur qui soupire,
Et ce mot qui sépare… il faut enfin le dire !

Maintenant que nous connaissons le monsieur, il nous est facile de construire sa comédie. Il s’éloigne une première fois, sous prétexte d’aller voir son père et de le fléchir en lui représentant la gentillesse de son petit-fils. Et la réponse, vraie ou inventée, que le voyageur rapporte, enlève naturellement à Marceline toute espérance.

Il dut se faire entendre aisément d’une personne à qui le répertoire offrait maintes situations analogues. Il n’eut qu’à fournir le canevas : « Je ne veux pas que tu épouses une comédienne ! » pour qu’elle se mît à broder ; et elle broda en effet la tirade à Délie, confidente indiquée.