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LA DIOPTRIOIIE

mathématiques, mais qui prenoit particulièrement plaisir à faire des miroirs de verres bruslans, en composant mesme l’hyver avec de la glace, ainsi que l’experience a monstré qu’on en peut faire; ayant à cete occasion plusieurs verres de diverses formes, s’avisa par bonheur de regarder au travers de deus, dont l’un estoit un peu plus espais au milieu qu’aux extrémités, & l’autre au contraire beaucoup plus espais aus extrémités qu’au milieu, & il les appliqua si heureusement aus deux bouts d’un tuyau, que la premiere des lunettes, dont nous parlons, en fut composée. Et c’est seulement sur ce patron, que toutes les autres qu’on a veües depuis, ont esté faites, sans que personne encore, que je sçache, ait suffisanment determiné les figures que ces verres doivent avoir. Car, bienqu’il y ait eu depuis quantité de bons esprits, qui ont fort cultivé cete matiere , & ont trouvé à son occasion plusieurs choses en l’Optique qui valent mieux, que ce que nous en avoient laissé les anciens, toutefois à cause que les inventions un peu malaysées n’arrivent pas à leur dernier degré de perfection du premier coup, il est encore demeuré assés de difficultéz en celle cy, pour me donner sujet d’en escrire. Et d’autant que l’execution des choses que je diray, doit dépendre de l’industrie des artisans, qui pour l’ordinaire n’ont point estudié, je tascheray de me rendre intelligible à tout le monde, & de ne rien omettre ny supposer, qu’on doive avoir appris des autres sciences. C’est pourquoy je commenceray par l’explication de la lumiere & de ses rayons, puis ayant fait une brieve description des parties de l’œil, je diray particulierement en quelle sorte se fait la vision; & en fuite ayant