Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, XII.djvu/332

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’il se pourvoirait, avant un an, auprès d’une Université catholique, de la licence en théologie qu’il n’avait pas encore ; un second délai d’une année lui fut accordé en i633, et il est à croire que Caterus se mit alors en règle : car lorsqu’il mourut, le 17 juillet 1656, il est qualifié de « maître ès arts libéraux et licencié en théologie ». Peut-être était-il allé prendre ses grades à Louvain, où en seignait, entre autres, un professeur du pays, Plempius (Vopiscus-Fortunatus), dont un frère, d’ailleurs Jésuite, le P. Plemp (Peter), exerçait son ministère précisément à Alkmaar. Dès lors tout s’explique. En 1640, Descartes, avant d’envoyer son manuscrit en France, le soumet à Bannius et à Bloemaert, autant dire au chapitre de Harlem : à défaut d’une Faculté de théologie, n’était-ce pas en pareille matière la plus haute autorité doctrinale que le catholicisme eût en Hollande ? Mais les deux bons chanoines, dont les études théologiques étaient sans doute un peu lointaines, et qui, nous l’avons vu[1], s’occupaient plutôt de science musicale, firent appel à leur confrère plus jeune apparemment et surtout dont les connaissances étaient de plus fraîche date, l’archiprêtre d’Alkmaar Caterus. Peut-être Descartes s’imaginait-il que la Sorbonne de Paris ferait à son ouvrage un accueil plus favorable, s’il se présentait avec l’approbation de cette petite Sorbonne de la Hollande, le chapitre diocésain de Harlem ; et c’est ainsi que les objections du théologien Caterus accompagnèrent en France la métaphysique du philosophe : sorte de passeport, ou de brevet, ou de patente d’orthodoxie, comme en avaient les pèlerins qui se rendaient à Lorette[2].

  1. Ci-avant, p. 122.
  2. Tome III, p. 265, l. 20-27, et p. 267, l. 8-10. Caterus avait encore présent à l’esprit ses auteurs, et il les cite : les classiques d’abord, saint Thomas, Duns Scot, saint Denys et même Boèce, puis le docteur dont les ouvrages faisaient alors autorité dans les écoles catholiques, Francesco Suarez. Descartes répond à tout avec empressement. — Notons ce détail, t. VII, p. 95, l. 13-14 : Scio me aliquando ita Suarem audiviſſe. Déclaration embarrassante, le Jésuite espagnol Suarez, né le 5 janvier 1548, mourut le 25 sept. 1617, et enseigna les vingt dernières années de sa vie à l’Université de Coïmbre. Caterus aurait donc entendu, non pas Suarez