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Traité de l’Homme.

Pour ce qui eſt des parties du ſang qui penetrent iuſqu’au cerueau, elles n’y ſeruent pas ſeulement a nourir | & entretenir ſa ſubftance, mais principalement auſſi à y produire vn certain vent tres ſubtil, ou 5 plutoſt vne flame tres viue & tres pure, qu’on nomme les Eſprits animaux. Car il faut ſçauoir, que les arteres qui les apportent du cœur, après s’eſtre diuiſées en vne infinité de petites branches, & auoir compoſé ces petits tiſſus, qui ſont eſtendus comme des tapiſſeries au 10 fond des concauitez du cerueau, ſe raſſemblent autour d’vne certaine petite glande, ſituée enuiron le milieu de la ſubſtance de ce cerueau, tout à l’entrée de ſes concauitez ; & ont en cet endroit vn grand nombre de petits trous, par où les plus ſubtiles parties du ſang 15 qu’elles contiennent, ſe peuuent écouler dans cette glande, mais qui ſont ſi étroits, qu’ils ne donnent aucun paſſage aux plus groſſieres.

Il faut auſſi ſçauoir, que ces artères ne s’arreſtent pas là, mais que, s’y eſtant aſſemblées pluſieurs en vne, 20 elles montent tout droit, & ſe vont rendre dans ce grand vaiſſeau qui eſt comme vn Euripe, dont toute la ſuperficie exterieure de ce cerueau eſt arroſée. Et de plus il faut remarquer, que les plus groſſes parties du ſang peuuent perdre beaucoup de leur agitation, dans 25 les detours des petits tiſſus par où elles paſſent : d’autant qu’elles ont la force de pouſſer les plus petites qui ſont parmy elles, & ainſi de la leur transferer ; mais que ces plus petites ne peuuent pas en meſme façon perdre la leur, d’autant qu’elle eſt meſme {{nlg|30 augmentée par celle que leur transferent les plus groſſes, & qu’il n’y a point d’autres corps autour