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5-6.
Le Monde

concauité droite du cœur, entrent dedans par l’artere que les Anatomiſtes ont nommé la Vene arterieuſe, elles s’y épaiſſiſſent & conuertiſſent en ſang derechef ; puis de là tombent goutte à goutte dans la concauité gauche du cœur ; où ſi elles entroient ſans eſtre ainſi 5 derechef épaiſſies, elles ne ſeroient pas ſuffiſantes pour ſeruir de nourriture au feu qui y eſt.

Et ainſi vous voyez que la reſpiration, qui ſert ſeulement en cette machine à y épaiſſir ces vapeurs, n’eſt pas moins neceſſaire à l’entretenement de ce feu, que 10 l’eſt celle qui eſt en nous, à la conſeruation de noſtre vie, au moins en ceux de nous qui ſont hommes formez ; car pour les enfans, qui eſtans encore au ventre de leurs meres ne peuuent attirer aucun air frais en reſpirant, ils ont deux conduits qui ſupléent à ce 15 deſaut : l’vn par où le ſang de la vene caue paſſe dans la vene nommée artere, & l’autre par où les vapeurs, ou le ſang raréfié de l’artere nommée vene, s’exhalent & vont dans la grande artere. Et pour les animaux qui n’ont point du tout de poulmon, ils n’ont qu’vne ſeule 20 concauité dans le cœur ; ou bien, s’ils y en ont pluſieurs, elles ſont toutes conſecutiues l’vne à l’autre.

Le pouls, ou battement des arteres, dépend des onze petites peaux, qui, comme autant de petites portes, ferment & ouurent les entrées des quatre vaiſſeaux qui 25 regardent dans les deux concauitez du cœur ; car au mo|ment qu’vn de ces battemens ceſſe, & qu’vn autre eſt preſt de commencer, celles de ces petites portes qui ſont aux entrées des deux arteres, ſe trouuent exactement fermées, & celles qui ſont aux entrées des deux 30 venes, ſe trouuent ouuertes : ſi bien qu’il ne peut man-