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« …Or[1] toutes les queſtions ſont ou de mots ou de choſes. l’appelle icy queſtions de mots, non pas celles où on cherche des mots, mais celles où par les mots on cherche des choſes : comme celles où il s’agit de trouver le ſens d’une enigme, ou d’expliquer ce qu’a voulu dire un Auteur par des paroles obſcures ou ambiguës. »

« Les queſtions de choſes[2] ſe peuvent reduire à quatre principales eſpeces. »

« La 1. eſt, quand on cherche les cauſes par les effets. On ſçait, >par exemple, les divers effets de l’Aimant : on en cherche la cauſe. On ſçait les divers effets qu’on a accoutumé d’attribuer à l’horreur du vuide : on recherche ſi c’en eſt la vraye cauſe, & on a trouvé que non[3]. On connoît le flus & le reflus de la mer : on demande quelle peut eſtre la cauſe d’un ſi grand mouvement & ſi reglé. »

« La 2, eſt, quand on cherche les effets par les cauſes. On a ſceu, par exemple, de tous temps que le vent & l’eau avoient grande force pour mouvoir les corps ; mais les Anciens, n’ayant pas aſſez examiné quels pouvoient eſtre les effets de ces cauſes, ne les avoient point appliquez, comme on a fait depuis par le moyen des moulins, à un grand nombre de choſes très utiles à la ſocieté humaine, & qui ſoulagent notablement le travail des hommes : ce qui devroit eſtre le fruit de la vraye Phyſique. De forte que l’on peut dire que la premiere ſorte de queſtions, où l’on cherche les cauſes par les

  1. Résumé de l’alinéa, p. 433 ci-avant, l. 1, à p. 434, l. 11.
  2. Développement des trois ou quatre lignes de Descartes, p. 434, l. 1-3, et p. 434, l. 5-6. On pourrait croire que ce long passage de la Logique de Port-Royal comble une lacune du texte de Descartes imprimé en 1701, et supplée à ce qui manque p. 434, l. 6. Mais ce ne sont que des exemples, apportés par Arnauld, pour illustrer et interpréter les quelques lignes du texte latin. Voir la note suivante.
  3. « On a trouve que non. » Rappelons que cette seconde édition de la Logique de Port-Royal est de 1664, et que, l’année précédente, venait de paraître un ouvrage posthume de Pascal (mort le 19 août 1662) : Traitez de l’equilibre des liqueurs & de la pesanteur de la masse de l’air, contenant l’explication des cauſes de divers effets de la nature qui n’avoient point eſté bien connus juſques ici & particulierement de ceux que l’on avoit attribuez à l’horreur du vuide, par Monſieur Pascal. (Paris, Guillaume Desprez, 1663, in-12. Préface, 26 pages. Pp. 239, plus 2 pl.) En 1648 et 1647, Pascal avait publié lui-même ses expériences sur ce sujet (voir t. V de cette édition, p. 100-101). Ce seul fait suffit à prouver que la Logique de P. R. ne traduit pas ici un texte de Descartes, celui-ci n’ayant pu tenir ce langage à la date où vraisemblablement il écrivit les Regulæ, c’est-à-dire en 1628.