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48 OEuvRES DE Descartes.

��53. Que chaque fubjlance a vn attribut principal, & que celuy de l'ame

ejï la penfée, comme l'extenfion ejl celuy du corps.

Mais, encore que chaque attribut foit fuffifant pour faire con- noiltre la fubftance, il y en a toutesfois vn... en chacune, qui confti- tuë fa nature & fon effence, & de qui tous les autres dépendent. A fçauoir l'eftenduë en longueur, largeur & profondeur, conftituë la nature de la fubftance corporelle ; & la penfée conftituë la nature de la fubftance qui penfe. Car tout ce que d'ailleurs on peut attribuer au corps, prefupofe de l'eftenduë, & n'eft quV«e dépendance de ce

37 qui eft eftendu ;de mefme, toutes les proprie\te:{ que nous trouuons en la chofe qui penfe, ne font que des façons différentes de penfer. Ainfi nous ne fçaurions conceuoir, par exemple, de figure, û ce n'eft en vne chofe eftenduë, ny de mouuement, qu'en vn efpace qui eft eftendu; ainfi l'imagination, le fentiment & la volonté dépendent tellement d'vne chofe qui penfe, que nous ne les pouuons conce- uoir fans elle. Mais, au contraire, nous pouuons conceuoir l'eften- duë fans figure ou fans mouuement, & la chofe qui penfe fans ima- gination ou fans fentiment, & ainfi du refte. . .

54. Comment nous pouuons auoir des penfées dijlinâes de la fubjlance

qui penfe, de celle qui eji corporelle, & de Dieu.

Nous pouuons donc auoir deux notions ou idées claires & di- ftinctes, l'vne d'vne fubftance créée qui penfe, & l'autre d'vne fub- ftance eftenduë, pourueu que nous feparions foigneufement tous les attributs de la penfée d'auec les attributs de l'eftenduë. Nous pou- uons auoir aufli vne idée claire & diftinde d'vne fubftance increée qui penfe & qui eft indépendante, c'eft à dire d'vn Dieu, pourueu que nous ne penfions pgs que cette idée nous reprefente. . . tout ce qui eft en luy, & que nous n'y méfiions rien par vne fidion de noftre entendement; mais que nous prenions garde feulement à ce qui eft compris véritablement en la notion diftinde que nous auons de luy & que nous fçauons appartenir à la nature d'vn Eftre

38 tout parfait. Car il n'y a per|fonne qui puifl'e nier qu'vne telle idée de Dieu foit en nous, s'il ne veut croire yt7«s rai/on que l'en- tendement humain ne fçauroit auoir aucune connoiflance de la Diuinité.

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