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a27-229- Quatrièmes Réponses. 177

Car, dans |la mefme fixiéme Méditation, où i'a}' parlé de la diftin- dion de l'efprit d'auec le corps, i'ay aufli montré qu'il luy ell: fubftan- tiellement vny ; pour preuue de quoy ie me fuis lerui de raifons qui font telles, que ie n'ay point fouuenance d'en auoir iamais leu ailleurs de plus fortes & conuaincantes.

Et comme celuy qui diroit que le bras d'vn homme eft vne fub- ftance réellement diftinde du refte de fon corps, ne nieroit pas pour cela qu'il eft de l'effence de l'homme entier, & que celuy qui dit que ce mefme bras eft de l'effence de l'homme entier, ne donne pas pour cela occafion de croire qu'il ne peut pas fubfifter par foy ; rinfi ie ne penfe pas auoir trop prouué en montrant que l'efprit peut eftre fans le corps, ny auoir aulTi trop peu dit, en difant qu'il luy eft fubftan- tiellement vny; parce que cette vnion fubftantielle n'empêche pas qu'on ne puilfe auoir vne claire & diftincte idée ou concept de l'ef- prit, comme d'vne chofe complète; c'eft pourquoy le concept de l'efprit diffère beaucoup de celuy de la fuperfîcie & de la ligne, qui ne peuuent pas eftre ainli entendues comme des chofes complètes, |fi, outre la longueur & la largeur, or ne leur attribue auffi la pro- 303 fondeur.

Et enfin, de ce-que la faculté de peufer eft affoupie dans les en/ans, 6 que dans les faux elle e/?,non pas à la vérité éteinte, mais troublée, il ne faut pas penfer qu'elle foit tellement attachée aux organes cor- porels, qu'elle ne puiffe eftre fans eux. Car, de ce que nous voyons fouuent qu'elle ef\ empêchée par ces organes, il ne s'enfuit aucune- ment qu'elle foit produite par eux; & il n'eft pas poflible d'en donner aucune railbn, tant légère qu'elle puiffe eftre.

le ne nie pas neantmoins que cette étroite liaifon de l'efprit & du corps, que nous expérimentons tous les iours, | ne foit caufe que nous ne découurons pas ayfément, & fans vne profonde méditation, la dil^indion réelle qui eft entre l'vn & l'autre.

Mais, à mon iugement, ceux qui repalieront Ibuuent dans leur efpiit les chofes que i'ay efcrites dans ma féconde Méditation, fe per- fuaderont ayiement que l'efprit n'eft pas diftingué du corps par vne feule fîdion ou abftradion de l'entendement, mais qu'il eft connu comme vne chofe diftinète, parce qu'il eft tel en effed.

le ne répons rien à ce que Monfieur Arnauld a icy adiouté tou- chant l'immortalité de l'ame, puifque cela ne m'eft point contraire ; mais, pour ce qui regarde les âmes des beftes, quoy que leur confi- Ideration ne foit pas de ce lieu, & que, fans l'explication de toute la 304 phyfique, ie n'en puiffe dire dauantagc que ce que i'ay défia dit dans la 5 partie de mon traité de la Méthode, toutesfois ie diray encore Œuvres. IV. 2 3

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