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OEUVRES DE DeSGARTES. 220-222.

il n’est pas neceſſaire que la connoissance que nous auons de ces choſes soit entière & parfaite, si nous ne ſçauons en meſme temps qu’elle est telle ; mais nous ne le pouuons iamais fçauoir, comme ie viens de prouuer ; donc il n’est pas neceſſaire qu’elle soit entière & parfaite.

293 C’est pourquoy, où l’ay dit qu’il ne suffil pas quvne chofi soit coiiceuëfans vue attire \ par une abstraction de l’esprit qui conçoit la chose si7tparf ai tentent, ie n’ay pas pensé que de là l’on peuit inférer que, pour établir vne distinction réelle, il fufl : besoin d’vne connoiſſance entière & parfaite, mais seulement d’vne qui full telle, que nous ne la rendiffions point imparfaite & defeâueuse par l’abstraction & restriclion de nostre esprit.

Car il y a bien de la différence entre auoir vne connoissance entièrement parfaite, de laquelle personne ne peut iamais estre assuré, si Dieu mefme ne luy reuele, & auoir vne connoissance parfaite iusqu’à ce point que nous fçachions qu’elle n’est point rendue imparfaite par aucune abltraction de nostre esprit.

Ainsi, quand l’ay dit qu’il faloit conceuoir pleinement vne chose, ce n’effort pas mon intention de dire que nostre conception deuoit estre entière & parfaite, mais seulement, qu’elle deuoit estre allez distinde, pour fçauoir que cette chose effort complète.

Ce que le pensois estre manifeste, tant par les choses que l’auois dit auparauant, que par celles qui fument immédiatement aprez : car l’auois distingué vn peu auparauant les estres incomplets de ceux qui font complets, & l’auois dit qu’il effort nécessaire que chacune des choses qui sont distinguées réellement, fuft conceuë comme vn estre par foy & distind de tout autre.

294 |Et vn peu aprez, au mefme sens que l’ay dit que le conceuois pleinement ce que c’est que le corps, l’ay actiouté au mefme lieu que le conceuois aussi que l’esprit est vns chose complète, prenant ces deux façons de parler, conceuoir pleinement, & conceuoir que c’est vne chose complète, en vne seule & mefme signification.

Mais on peut roy demander auec raison ce que l’entens par vne chose complète, & comment ie prouue que, pour la distinction réelle, ilfujsit que deux choses foyent conceuës l’une sans l’autre comme deux choses complètes.

I A la première demande ie répons que, par vne chose complète, ie n’entens autre chose qu’vne substance reuétuë des formes, ou attributs, qui suffisent pour me faire connoistre qu’elle est vne substance.

Car, comme l’ay défia remarqué ailleurs, nous ne connoissons point les substances immédiatement par elles-mefmes ; mais, de ce

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