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209-210. Quatrièmes Objections. i6j

quelque puiflance réelle & politiue, qui me crée quafi derechef en tous les momens.

Quant à la mineure, à fçauoir que ie ne puis eftre par moy pofiti- uement & comme par vne caufe, elle me J'emble fi manifejîe par la lumière naturelle, que ce ferait en vain qilon s'arrejleroit à la vouloir prouuer, puifque ce feroit perdre le temps àprouuer vne cliofe connue par vne ai ire moins connue. Nq/îre auteur me/me femble en auoir reconnu la vérité, lorj'qu'il n'a pas ofé la nier ouuei-lement. Car, ie vous prie, examinons foigneufement ces paroles de fa Réponfe aux premières Obiecîions :

le n'a}' pas dit, dit-il, qu'il eit impolFible qu'vne choie loit la caufe efficiente de loy-mefme ; car, encore que cela foit | manifeltement 276 véritable, quand on reftraint la fighification d'efficient à ces fortes dt caufes qui ibnt différentes de leurs efFects, ou qui les précèdent en temps, il ne femble pas neantmoins que, dans cette queftion, on la doiue ainfi rellraindre, parce que la lumière naturelle ne nous difte point que ce foit le propre de la caufe efficiente de précéder en temps fon effecl.

Cela eft fort bon pour ce qui regarde le premier membre de cette diftinâion ; mais pourquoj a-t-il obniis le fécond, & que n'a-t-il adiouté que la mefme lumière naturelle ne nous diâe point que ce foit le propre de la caufe efficiente d'e/lre différente de fon effeâ, finon parce que la lumière naturelle ne luy permettoit pas de le dire?

Et de vraj-, tout effeâ eftant dépendant de fa caufe, & receuant d'elle fon effre, n'e/l-il pas tres-euident qu'vne me/me chofe\ne peut pas dépendre ny receuoir l'ejlre de fof-mefme?

Dauantage, toute caufe eff la caufe d'vn effeél, & tout effeâ eft V effeâ d'vne caufe, & partant, il y a vu raport mutuel entre la caufe & l'effeâ : or il ne peut j' auoir de raport mutuel qu'entre deux chofes.

En après, on ne peut conceuoir, fans abfwdité, qu'vne chofe reçoiue l'eftre, & que neantmoins cette mefme chofe ait l'eftre aitparaiiant que nous ayons conceu qu'elle l'ait receu. Or cela arriueroitji nous attri- buions les notions de cnufe & d'effeâ à vne mefme chofe au regard de fof -mefme. Car \ quelle eft la notion d'vne caufe? Donner l'eftre. 277 Quelle eft la notion d'vn effeâ ? Le receuoir. Or la notion de la caufe précède naturellement la notion de l'effeâ.

Maintenant, nous ne pouuons pas conceuoir vne chofe fous la notion de caufe, comme donnant l'eftre, fi nous ne conceuons qu'elle l'a ; car

a. Il faudrait lire ici, /eco«i, et à la ligne suivante, premier, au lieu de fécond, les deux membres ayant été intervertis dans la traduction.

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