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estoit bien aise que sa fille se divertist. L’Espinay estoit bien à la Cour du prince d’Orange, qui n’estoit pas fasché qu’il fut souvent avec son filz ; il avoit l’esprit adroit, et asseurement il y auroit fait quelque fortune. »

Enfin, sur la liberté d’aller et venir, et aussi de manières, de la princesse Élisabeth en Hollande, nous avons le témoignage de Sorbière, p. 102-104 des Sorberiana (Tolosæ, MDCXCI).

« Élisabeth de Boheme. De mon tems, qui étoit 1642, en Hollande, c’étoit un divertissement des Dames d’aler en bateau de la Haie à Delft ou à Leyde, habillées en bourgeoises, et mélées parmi le vulgaire, afin d’ouïr les discours que l’on tiendroit des Grands, sur le propos desquels elles jettoient la compagnie. Et il arrivoit souvent qu’elles oioient diverses choses qui les touchoient, et même leur galanterie aiant quelque chose d’extraordinaire, elles ne revenoient gueres sans trouver quelque cavalier qui leur ofroit son service, et qui au débarquer se voioit bien trompé de la petite espérance qu’il avoit conçuë que ce fussent des courtisanes ; parce que toujours un carosse les attendoit. Élizabet, l’ainée des Princesses de Boheme, étoit quelquefois de la partie. On racontoit merveilles de cette rare personne qu’à la connoissance des langues elle ajoutoit celle des sciences ; qu’elle ne s’amusoit point aux vétilles de l’école, mais vouloit connoître les choses clairement ; que pour cela elle avoit un esprit net et un jugement solide ; qu’elle avoit pris plaisir à ouïr Descartes ; qu’elle le lisoit fort avant dans la nuit ; qu’elle se faisoit faire des dissections et des expériences ; qu’il y avoit en son Palais un Ministre tenu pour Socinien. Son age sembloit de vingt ans ; sa beauté et sa prestance étoient vraiment d’une héroïne. Elle avoit trois sœurs et cinq frères : Frederic, Robert, Maurice, Edouard, Philippe ; Louise, Henriette, Sophie. »

Notons que Descartes, qui s’était rendu à la Haye après le meurtre de L’Espinay (p. 449, l. 5), y retourna au reçu de cette lettre (voir ci-après lettre CDXLV). Ce fut sa dernière entrevue avec Elisabeth, qu’il ne devait plus revoir.


CDXLII.

[Clerselier] à Descartes.

[Paris, juillet 1646.]

Texte de l’édition latine, tome II, epist. 13, p. 42-66.


Clerselier ne donne qu’une version française de cette lettre, t. II, lettre 13, p. 69-101, « À Monsieur Descartes », sans date. Mais on