Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, I.djvu/429

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

puis i’auois différé iuſques au voyaſge de ſon filz. Ie vous ay tres grande obligation du ſoin que vous aués eu de me faire auoir la connoiſſance du tourneur dont vous m’eſcriués, & ie ne manqueray pas de l’aller voir 5 en cete ville a la premirre commodité. Mais ce qui vaut mieux que tous les tourneurs du monde, c’eſt que Monſieur de Zuilicom, que i’ay eu l’honneur de voir ces iours a Amſterdam, après auoir eu la patience d’ouir lire vne partie de ma Dioptrique, c’eſt 10 offert d’en faire faire luy meſme quelque eſpreuue ; ce qui me met entierement hors de peine de ce coſté, car ie m’aſſure que, s’il eſt poſſible que la choſe reuſſiſſe, il en trouuera les expédiens pluſtoſt que personne. Veritablement c’eſt vn homme qui eſt au dela 15 de toute l’eſtime qu’on en ſçauroit faire, & encore que ie l’euſſe ouy louer a l’extreme par beaucoup de perſonnes dignes de ſoy, ſi eſt-ce que ie n’auois encore pû me perſuader qu’vn meſme eſprit ſe puſt occuper a tant de choſes & s’acquiter ſi bien de toutes, ny 20 demeurer ſi net & ſi preſent parmi vne ſi grande diuerſité de penſées, & auec cela retenir vne franchiſe ſi peu corrompue parmi les contraintes de la cour. Il y a des qualités qui font qu’on eſtime ceux qui les ont ſans faire pour cela qu’on les ayme, & d’autres qui 25 font qu’on les ayme ſans qu’on les en eſtime beaucoup dauantage ; mais ie trouue qu’il poſſede en perfection celles qui font enſemble l’vn & l’autre. Et ie ne tire pas peu de vanité de ce que ie ne luy ay ſceu dire aucune choſe qu’il ne compriſt quaſi auant que 30 i’euſſe commencé de l’expliquer. Car ſi la Metempſicoſe & la reminiſcence de Socrate auoient lieu, cela