L’AMI D’ENFANCE.
Un ami me parlait et me regardait vivre.
Alors, c’était mourir… Mon jeune âge était ivre
De l’orage enfermé dont la foudre est au cœur :
Et cet ami riait, car il était moqueur.
Il n’avait pas d’aimer la funeste science.
Son seul orage à lui c’était l’impatience.
Léger comme l’oiseau qui siffle avant d’aimer,
Disant : « Tout feu s’éteint, puisqu’il peut s’allumer ; »
Plein de chants, plein d’audace et d’orgueil sans alarme,
Il eût mis tout un jour à comprendre une larme.
De nos printemps égaux lui seul portait les fleurs ;
J’étais déjà l’aînée, hélas ! par bien des pleurs.
Décorant sa pitié d’une grâce insolente,
Il disputait, joyeux, avec ma voix tremblante ;
À ses doutes railleurs je répondais trop bas….
Prouve-t-on que l’on souffre à qui ne souffre pas ?
Soudain, presque en colère, il m’appela méchante,
De tromper la saison où l’on joue, où l’on chante :