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Il faudrait par fierté sourire en sa présence :
J’aime mieux mourir sans témoin.

Il ne reviendra plus, il sait que je l’abhorre ;
Je l’ai dit à l’Amour, qui déjà s’est enfui.
S’il osait revenir, je le dirais encore :
Mais on approche, on parle… Hélas ! ce n’est pas lui !





LES LETTRES


Hélas ! que voulez-vous de moi,
Lettres d’amour, plaintes mystérieuses ?
Vous dont j’ai repoussé longtemps avec effroi
Les prières silencieuses,
Vous m’appelez… je rêve, et je cherche, en tremblant,
Sur mon cœur, une clef qui jamais ne s’égare :
D’un éclair l’intervalle à présent nous sépare ;
Mais cet intervalle est brûlant !

Je n’ose respirer ! triste sans amertume,
Au passé, malgré moi, je me sens réunir :
Las d’oppresser mon sein, l’ennui qui me consume
Va m’attendre dans l’avenir.
Je cède : prends sa place, ô délirante joie !
Laisse fuir la douleur, cache-moi l’horizon ;
Elle t’abandonne sa proie,
Je t’abandonne ma raison !
Oui, du bonheur vers moi l’ombre se précipite :