Page:Desbordes-Valmore - Poésies, 1860.djvu/61

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Sans prévenir, elle dit : « Me voilà !
Ce cœur m’attend. Par l’Amour que j’implore,
Comme autrefois j’y viens régner encore ! »
Au nom d’amour ma raison se troubla ;
Je voulus fuir, et tout mon corps trembla ;
Je bégayai des plaintes au perfide ;
Pour me toucher il prit un air timide ;
Puis à mes pieds, en pleurant, il tomba :
J’oubliai tout dès que l’Amour pleura !





L’IMPRUDENCE


Comme une fleur à plaisir effeuillée,
Pâlit, tombe et s’efface une brillante erreur.
Ivre de toi, je rêvais le bonheur ;
Je rêvais : tu m’as éveillée.
Que ce réveil va me coûter de pleurs !
Dans le sein de l’Amour pourrai-je les répandre ?
Il m’enchaînait à toi par des liens de fleurs ;
Tu me forces à les lui rendre !

Un seul mot à nos yeux découvre l’avenir ;
Un reproche souvent attriste l’espérance.
Hélas ! s’il faut rougir d’une tendre imprudence,
Toi qui la partageas, devais-tu m’en punir ?
Loin de moi va chercher un plus doux esclavage ;
Va ! de tout mon bonheur j’ai payé ton bonheur :
Eh bien, pour t’en venger tu m’as rendu mon cœur,