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IDYLLES.


L’ORAGE


Oh ! quelle accablante chaleur !
On dirait que le ciel va toucher la montagne.
Vois ce nuage en feu qui rougit la campagne :
Quels éclairs ! quel bruit sourd ! ne t’en va pas ; j’ai peur !
Les cris aigus de l’hirondelle
Annoncent le danger qui règne autour de nous ;
Son amant effrayé la poursuit et l’appelle :
Pauvres petits oiseaux, vous retrouverez-vous ?

Reste, mon bien-aimé ! reste, je t’en conjure ;
Le ciel va s’entr’ouvrir.
De l’orage, sans moi, tu veux braver l’injure ;
Cruel ! en me quittant tu me verrais mourir.
Ce nuage embrasé qui promène la foudre,
Vois-tu bien, s’il éclate, on est réduit en poudre !
Encourage mon cœur, il palpite pour toi…
Ta main tremble, Olivier, as-tu peur comme moi ?
Tu t’éloignes ; tu crains un danger que j’ignore :
En est-il un plus grand que d’exposer tes jours ?
Je donnerais pour toi ma vie et nos amours ;
Si j’avais d’autres biens, tu les aurais encore.
En cédant à tes vœux, j’ai trahi mon devoir ;
Mais ne m’en punis pas. Elle est loin, ta chaumière.
Pour nous parler d’amour, tu demandais le soir ;
Eh bien ! pour te sauver prends la nuit tout entière ;
Mais ne me parle plus de ce cruel amour ;
Je vais l’offrir à Dieu dans ma tristesse extrême :