Page:Desbordes-Valmore - Poésies, 1820.pdf/90

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(82)

Ah ! si l’ingrat ne peut aimer,
À quoi sert l’amour qu’il fait naître ?

Je l’ai prévu… j’ai voulu fuir ;
L’Amour jamais n’eut de moi que des larmes :
Vous avez ri de mes alarmes,
Et vous riez encor quand je me sens mourir…
Grâce à vous, j’ai perdu le repos de ma vie :
Votre imprudence a causé mon malheur ;
Et vous m’avez ravi jusques à la douceur
De pleurer avec mon amie !
Laissez-moi seule avec mon désespoir ;
Vous ne pouvez me plaindre ni m’entendre ;
Vous causez la douleur, sans même la comprendre ;
À quoi me servirait de vous la laisser voir ?
Victime d’un amant, par vous-même trahie,
J’abhorre l’Amitié… je la fuis sans retour ;
Et je vois, à sa perfidie,
Que l’ingrate est sœur de l’Amour !