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PAUVRES FLEURS.

C’était loin : mais l’étoile allait, cherchait pour moi,
Et me frayait la terre où tu m’avais suivie,
Où tu me reconnus d’autre part ; oui, des cieux ;
Moi de même ; il restait tant de ciel dans tes yeux !

Mais le sais-tu ? trois fois le jour de la naissance
Baisa mon front limpide assoupi d’innocence,
Avant que ton étoile à toi, lente à venir,
Descendît marier notre double avenir.
Oh ! devions-nous ainsi naître absens de nous-mêmes ;
Toi, tu ne le sais pas en ce moment ; tu m’aimes,
Je ne suis pas l’aînée. Encor vierge au bonheur,
J’avais un pur aimant pour attirer ton cœur ;
Car le mien, fleur tardive en soi-même exilée,
N’épanouit qu’à toi sa couronne voilée,
Cœur d’attente oppressé dans un tremblant séjour
Où ma mère enferma son nom de femme : Amour.

Comme le rossignol qui meurt de mélodie,
Souffle sur son enfant sa tendre maladie,