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PAUVRES FLEURS.

Sans l’âme que j’attends, qui n’est pas libre encore,
Je ne veux pas monter dans l’éternelle aurore.
Si Dieu me voit cachée, il n’en fait pas semblant :
Lui, quand il faut punir, il est père ! il est lent.

Quand l’orage se lève et siffle avec colère,
Je me tais, dans l’effroi d’être prise à son vol,
Jusqu’à l’heure où la lune humide et molle, et claire,
Ramène à mon ruisseau l’altéré rossignol.
Le rossignol ce soir, a dit de tendres choses
Aux tombes que la lune illumine en ce lieu ;
Et les morts ont tenu leurs demeures moins closes,
Au doux requiescat qui s’en allait vers Dieu :

Ce long sanglot traîné dans l’ombre ;
Ce feu qui parle à la nuit sombre,
Ce souffle errant du Créateur,
Qui navre et fait pâmer le cœur :

Vraiment ! ce n’était pas pour les tombes d’argile,
Ni pour les trépassés dans leur demi sommeil,