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PAUVRES FLEURS.

Il conta sa fortune à l’amante modeste,
Et puis plus bas : « ce soir je vous dirai le reste. »
La tremblante levrette entendit ses adieux,
Le salua pensive et le suivit des yeux.

Ce jour gros d’une fête éclate d’espérance ;
Et revêt pour Castor sa plus rose apparence ;
Il va cueillir ses fruits au toit de l’amitié,
Et du bonheur qui mange apprendre la moitié !
Tous les gardiens sont hors de la cuisine ; ô joie !
La broche tourne seule ; on flaire ! on peut choisir ;
L’eau leur en vient du cœur et prêts à s’en saisir,
Ils dansent autour de leur proie !
Elle est lourde et brûlante, il faut la partager.
Ciel ! si près du plaisir pourquoi donc le danger ?
Laissez-leur ce bazard dont l’odeur les enchante ;
Point ! dans l’hôtel en vain l’on s’énivre, l’on chante,
L’orage couve et gronde : un marmiton hideux,
Et prompt comme la mort s’élance au milieu d’eux :
Il épargne Pollux qui hurle et qui se nomme ;
Et jette au vent Castor, l’indigent gastronome !