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PAUVRES FLEURS.

Plus belle que pas une et suivie à la trace
Des parfums ruisselans de tes bandeaux de fleurs,
Reine par le maintien, poète par la grâce,
Enfant par la candeur, âme que l’âme embrasse,
Quel augure, en passant t’a demandé des pleurs ?

Tu te plains de la vie, et tu te sens aimée,
Folle ! à quelle douleur en as-tu ? je n’en sais
Qu’une immense, profonde, affreuse, envenimée,
Quand elle couve au cœur ses poisons amassés,
C’est le doute : oh ! le doute emprisonne une vie !
C’est le geôlier de l’âme et l’espion du sommeil ;
C’est le poignard levé qui nous frappe au réveil ;
Christ, n’en sauverait pas cette âme poursuivie !
Voilà ce que je sais de ce honteux effroi ;
Et tu te sens aimée et tu te plains… Tais-toi.

Viens ! viens épier l’aube à la lueur humide,
Quand sous ses voiles gris l’aube ouvre l’horizon.
Rien ne bruït là-bas qu’un filet d’eau limpide ;
La musique épuisée et la danse rapide,
Tout cherche le sommeil ; viens chercher la raison !