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PAUVRES FLEURS.

Pourquoi me tentez-vous, ô belle poésie !
Je ne sais rien. Pourquoi par vos mots d’ambroisie,
Arrêtez-vous, mon âme au bord de mes travaux
Et de ma main rêveuse ôtez-vous mes fuseaux ?
Je vous aime partout : mais stérile écouteuse,
Ma raison n’eut jamais qu’une clarté douteuse ;
Et j’ai peur de répondre et de laisser vibrer
Ma plainte dans des chants qui m’ont fait tant pleurer !
Est-ce au front incliné d’une vulgaire femme
Que vous devez ainsi secouer votre flamme ?
Aux soucis du ménage, au berceau qui s’endort,
Est-ce à moi de lier ma vie à vos fils d’or ?
Laissez-moi seule et pauvre, et mère vigilante,
Me débattre avec l’heure ou faites-la plus lente ;
Laissez tomber sans voix les larmes de mes yeux,
Qui cherchent leur chemin pour arriver aux cieux !