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PAUVRES FLEURS.

Ils n’auraient jamais faim de cette faim qui pleure,
Et ma colombe à Dieu l’irait dire à toute heure :
L’hiver, ils n’auraient point un âtre sans charbon ;
De longs jours sans manteaux, de longs soirs sans lumière ;
Je leur ferais des lits dans de tièdes chaumières,
Et des habits qui sentent bon !

— Cher petit perroquet ! comme tu parles vide !
Leur roi, c’est Dieu : La terre est leur froide maison.
Dieu regarde d’en haut si le plus fort avide,
Ne prend pas au plus faible un grain de sa moisson :
Un jour il pèse, il juge ! autour de sa balance,
Les semeurs dépouillés se rangent en silence ;
Le pauvre a recouvré le grain qu’il a perdu,
Et le plus fort est confondu.
N’ai-je pas lu cela dans tes leçons apprises ?

— Oui. Mais ne gronde pas ; j’ai donné tout mon pain,
Et la moitié de mes cerises !