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PAUVRES FLEURS

S’il achète si cher le secret des couleurs,
Qui le proclament peintre et font jaillir les pleurs ;
Si tu caches déjà ses lambeaux d’espérance,
L’illusion trahie et morte de souffrance,
Qu’il ne soulève plus que la pâleur au front,
Dans ton flot le plus sombre engloutis cet affront :
Qu’il vienne alors frapper à mon cœur solitaire,
Où l’écho du pays n’a jamais pu se taire ;
Qu’il y laisse tomber un mot du sol natal,
Pareil à l’eau du ciel sur une herbe flétrie,
Qui dans l’œil presque mort ranime la patrie,
Et mon cœur bondira comme un vivant métal !
Sur ma veille déjà son âme s’est penchée,
Et de cette âme en fleur les ailes m’ont touchée,
Et dans son jeune livre où l’on entend son cœur,
J’ai vu qu’il me disait : « Je vous parle, ma sœur ! »

Là, comme on voit dans l’eau, d’ombre et de ciel couverte,
Frissonner les vallons et les arbres mouvans,
Qui dansent avec elle au rire frais des vents,
J’ai regardé passer de notre Flandre verte,