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PAUVRES FLEURS.

Afin que s’il n’a pas auprès de lui sa mère,
Pour l’aider à porter quelque surprise amère,
Étonné de ce monde et déjà moins content,
Il ne dise jamais : « Personne ne m’entend ! »

N’est-il pas de ces jours où l’on ne sait que croire ;
Où tout se lève amer au fond de la mémoire ;
Où tout fait remonter les limons amassés,
Sous la surface unie où nos ans sont passés ?

Mémoire ! étang profond couvert de fleurs légères ;
Lac aux poissons dormeurs tapis dans les fougères,
Quand la pitié du temps, quand son pied calme et sûr,
Enfoncent le passé dans ton flot teint d’azur,
Mémoire ! au moindre éclair, au moindre goût d’orage,
Tu montres tes secrets, tes débris, tes naufrages,
Et sur ton voile ouvert les souffles les plus frais,
Ne font long-temps trembler que larmes et cyprès !
Lui ! S’il a de ces jours qui font pencher la vie,
Dont la mienne est partout devancée ou suivie,