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PAUVRES FLEURS.


Et quand le plomb mortel fait trembler chaque feuille,
Et les nids et l’orchestre et les hymnes d’un bois ;
Jugez comme l’oiseau dont l’instinct se recueille,
Retient avec effort ses ailes et sa voix !

Enfin, si dans son arbre on voit bouger sa tête,
Si pour ne pas mourir il chante encor son cœur,
Poète ! étonnez-vous que l’humaine tempête,
Ait trempé tout ce chant d’une étrange douleur !

Sous quelques rameaux verts, jardin de ma fenêtre,
Ma seule terre à moi qui m’ait donné des fleurs,
Rêveuse aux doux parfums qu’avril laissait renaître,
J’ai vu d’un noir tableau se broyer les couleurs :

Quand le sang inondait cette ville éperdue,
Quand la bombe et le plomb balayant chaque rue,
Excitaient les sanglots des tocsins effrayés,
Quand le rouge incendie aux longs bras déployés,