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PAUVRES FLEURS.


Moi, je mens ! au revoir après ce rêve étrange,
Que tu rêveras, toi, sous l’aile d’un autre ange.
De ce qui fut à nous emporte le bonheur ;
Je n’en avais besoin que quand j’avais un cœur ;
C’est là que je souffrais ; c’est là que je suis morte.
Va, nos songes vivans te serviront d’escorte…
Ces doux songes appris à travers tant d’espoir,
Ce n’est donc jamais vrai pour ce monde ! au revoir !

Tu viendras ! ce soir-là ce sera le silence ;
D’un passé mal éteint la vague ressemblance ;
Ce qu’on a ressenti d’amer et de profond,
Au jardin dévasté qui versa de l’ombrage,
Sur les jours haletans et doux du premier âge,
Jours fiévreux, pleins de bruits, que nuls bruits ne défont !

Viens, ce sera l’amour sans ses funestes charmes ;
L’amour qui ne meurt pas, si l’amour vit de larmes ;
Et mes cheveux défaits, changés, sans nœuds, sans fleurs,
Tressailleront encor d’avenir sous tes pleurs…