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L’été commence. Hélas ! c’est vivre peu de temps !
Viens voir, je porte encor la robe de l’enfance.
Le blé nouveau, le riz friand, les noix,
Disait ma mère, allaient avant deux mois
Enrichir mon adolescence.
Peu m’est assez pourtant ; facile à me nourrir,
Je ne suis pas gourmande et tout sert au ménage
Un grain d’orge suffit aux souris de mon âge,
Pour les empêcher de mourir.


« Ne me fais pas mourir ! suis l’exemple d’un sage :
Les souris sans danger visitaient son séjour ;
Car ce sage disait : « De nos ames un jour
« Le sein des animaux peut-être est le passage.
« Tout est possible à Dieu, l’impossible est son bien ;
« Si par lui l’homme est tout, par lui l’homme n’est rien.
« Grâce donc ! criait-il aux hommes en colère,
« Muets pour la clémence et sourds à la prière ;
« Grâce ! oubliez un peu les mots : glaive, trépas
« Régnez sur le plus faible et ne le tuez pas !