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SARAH.

Un soir que je revenais chargé de provisions, j’entendis une voix nouvelle dans la cabane de feuilles que j’avais construite pour Narcisse ; cette voix douce et faible était la vôtre, petite Sarah, et je vis dans les yeux de votre mère le seul rayon de joie qui ait passé près d’elle depuis le départ de mon maître. Elle sembla se ranimer aux soins qu’elle prit de vous, et s’oublier long-temps à contempler sa fille. Mais la Mort la regardait, cette belle Narcisse, quoiqu’elle voulût la tromper alors par amour pour vous. La Mort ne voulait plus se détourner d’elle, et faisait tous les jours un pas pour l’atteindre. Ma jeune maîtresse la voyait devant elle sous l’ombre des arbres et des noirs rochers qui nous entouraient ; quelquefois sa main languissante me faisait signe d’y regarder, et moi je ne voyois que l’ombre, les rochers et les arbres. Alors ses