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SARAH.

barbarie de faire conduire son fils, peu de jours après, sur un vaisseau destiné pour l’Europe ; et il le fit si bien garder jusque là, qu’il ne semblait pas moins esclave que nous. Tout ce qu’il obtint, en quittant pour toujours sa bien-aimée, ce fut ma liberté, que je reçus en pleurant, puisqu’elle me séparait de lui. La nuit qui précéda son départ, je me glissai dans sa chambre ; et, me traînant jusqu’à ses pieds, je le suppliai de m’emmener pour le servir, et pour lui parler tous les jours de Narcisse. Il me regarda d’un air consterné, et me dit : « Arsène, si tu me suis, qui restera près d’elle ? oh ! ne l’abandonne pas, mon fidèle Arsène ! tu m’aimeras en l’aimant, tu me consoleras en consolant ma plus chère moitié ; dis-lui tout ce que tu vois dans mes larmes ; n’y vois-tu pas, Arsène, que je meurs de tristesse, et que je meurs pour