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ADRIENNE.

« Le sort, poursuivit-il, qui nous a conduit si heureusement dans ce port, nous en avait violemment repoussés. Il y a deux ans… oui ! deux ans, le vaisseau que je dirigeai sur cette île, en quittant l’Angleterre, fut tout-à-coup arrêté par un calme plat, qui nous fixa douze jours sur le même point, et ne présageait rien d’heureux pour la suite. Ce présage ne fut pas trompeur ; car nous fûmes bientôt après jetés et poussés par les vents au hasards des écueils, sans plus pouvoir tenir une route réglée dans cette tourmente affreuse. Nous trouvâmes des compagnons d’infortune, aussi déroutés que nous ; mais qui, plus maltraités encore par la perte de leurs voiles et de leurs cordages, nous hélèrent, et nous firent des signes de détresse que nous comprîmes par la nôtre, mieux que par leurs plaintes à moitié perdues dans le bruit des vagues. Nous les jugeâmes à tel point désespérés et hors de