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MARIE.

ler, il est juste de dire tout ce que l’on en raconte.

La jalousie qui le piquait au cœur, n’avait pas en vérité l’amour pour son excuse. Il avait bien les yeux assez grands pour voir que Marie était belle ; mais ses yeux s’ouvraient avec plus d’envie sur ses beaux troupeaux qu’il avait autrefois gouvernés, et voilà pourquoi il était fâché de leur voir un autre gardien. Ce pâtre ingrat était pourtant riche par le bon cœur de Marie. Cette généreuse bergère lui ayant retiré la conduite de ses moutons, en faveur de l’étranger de la prairie, n’avait pu supporter une idée d’injustice. En gardant ses autres serviteurs, serviteurs choisis, estimés par son père, elle avait comblé celui-ci de bienfaits, et lui avait dit avec sa grâce touchante : « Écoute, Lucas, voici une pannetière nouvelle ; prends-la, prends encore cette jolie houlette. Sais-tu pourquoi je te fais ce présent ? Eh bien ! Lucas,