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UNE FEMME

Quelques jours après cet incident vulgaire, Haverdale quitta tout à coup la fenêtre où il était absorbé dans une rêverie profonde, et se plaça devant Bingley qui dessinait à une table ; puis, il attacha sur lui un regard indéfinissable, si long, si triste, que Bingley lui tendit la main en l’appelant comme autrefois : Larry ! Ce doux nom d’enfance pouvait seul rendre la tendresse insuffisante et désolée du bon Bingley, qui se remit à crayonner sans trop savoir ce qu’il faisait. La main d’Haverdale se posa puissante sur son épaule et le contraignit à se retourner encore ; puis après le même regard, qui recélait une étrange question, il dit lentement : — Si je l’épousais, Bingley ? Bingley frissonna, et demeura stupéfait sous cès paroles inattendues qui le firent changer de couleur ; après quoi prenant son parti d’homme et d’ami :

— L’épouser ! répondit-il, qui ?… ai-je entendu ? pardon, Larry, je rêve aussi tout éveillé. Si je l’épousais ! Bingley, reprit Haverdale immobile comme un homme qui va prendre une résolution inébranlable. —

-Quoi ! perdue aux yeux de l’Angleterre ! quoi ! ruinée sans retour par la vente de ses biens, dont l’ignoble Calpetti demeurera sans doute le tranquille possesseur ; car, où chercher ce misérable ? sans preuves pour le poursuivre ! Et puis tout le (