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LE BAISER DU ROI.

— Mais je n’empêche pas qu’il se sauve ! dit Christine épouvantée de tant de rudesse, et stupéfaite du calme profond de son père, qui observait tout avec un indulgent sourire.

— Impossible maintenant de s’y reconnaître, poursuivit-elle en cherchant à remettre sur pied roi, reine et cavaliers confondus dans une affreuse mêlée.

— N’essayez pas ! n’essayez pas ! cria Ericson comme hors de lui, en poussant violemment l’échiquier qui tomba sur le parquet. Le coup est décidé, vous m’avez fait échec et mat. Puis tout à coup comme honteux de sa violence et de l’influence qu’il laissait prendre sur lui par un si mièvre chose, il sortit avec l’air le plus hagard et le plus défait du monde, embarrassant ses pieds dans son sabre, et donnant au diable sa maladresse aussi bien que l’amour qui en était cause.

— Il ne reviendra pas, j’espère, dit Christine, en voyant au bout d’une heure rentrer son père qui s’était précipité sur les pas d’Ericson avec autant d’empressement que s’il eût été le plus aimable des convives.

— C’est ce qui vous trompe, ma chère, répondit le ministre plus joyeux qu’avant tout ce désastre ; il brûle déjà de revenir, et ne se console pas d’avoir ainsi employé les deux heures enchantées qu’il vous doit.