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LE BAISER DU ROI.

mide, et que son cœur battait d’une sympathie invincible. Christine n’aurait pas voulu mourir de son amour, mais elle voulait en vivre, et, violemment séparée de l’objet de cette amitié vierge et vraie, elle en eût traîné partout avec elle une douloureuse et ineffaçable impression.

Mais cela ne pouvait être ; mais ils seraient toujours ensemble ; mais, en dépit des troubles de son inquiet amant, une attraction fort peu combattue l’entraîna vers son miroir, où elle regarda longtemps ce qu’un gagneur de batailles pouvait trouver de si attrayant dans une forme si délicate et si peu comparable à ses rudes conquêtes. Elle se rappela l’ordre que son père lui avait donné de faire les honneurs du repas qu’il offrait le soir même à quelque nouvel ami, et suivit ponctuellement cet ordre, en ajoutant à sa parure tout ce qui pouvait combler d’orgueil le père le plus épris de la beauté de son enfant. Aussi, quand elle entra dans la salle chaude et parfumée par ses soins, où le souper était préparé avec une magnificence inhabituelle pour le riche ministre et son hôte unique, elle y parut assez ravissante pour l’adoration d’une cour entière.

Rien ne put donc décrire l’étonnement et le dépit de la brillante Christine, lorsqu’au lieu d’un étranger de distinction qu’elle s’attendait à frapper de ses charmes, elle reconnut, dans celui qui se leva