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LE BAISER DU ROI.

Le ministre regarda fixement au visage jeune et rose de sa fille comme pour plonger à travers ; et le pli d’effroi paternel qui s’était formé entre ses deux yeux disparut comme un éclair.

— Il n’y a là que de la vie, dit il en lui frappant doucement sur le front. Aussi, je ne songe qu’à marier cette méchante fille.

— Et vous nous rendrez les deux enfants les plus heureux de ce monde, répondit Christine, dont les yeux noirs étincelaient à travers ses larmes.

— Ma pauvre fille, vous avez été bien gâtée ! Je vous ai donné trop de licence et de liberté ! Voilà présentement que vous me demandez l’impossible. Soyez raisonnable ; et pour vous distraire un peu, votre tante vous présentera à la cour. Vous verrez de belles choses ; vous connaîtrez notre brave et jeune roi… si vous êtes raisonnable !

— Le rude monstre ! s’écria Christine en s’élevant avec vivacité. Je ne souhaite pas le voir ; on dit qu’il hait les femmes.

— C’est une calomnie : il est amoureux d’une.

— D’une belle ?

— Et méchante comme toi.

— Comme moi ?… Le comte se mit à rire, et l’instinct de Christine s’éveilla, car elle répondit après avoir un peu rêvé : Je ne l’ai pourtant jamais vu !

— Mais il t’a vue ; et il dit…